J'aime russifier ma langue...

Publié le par François POUYET

J'aime russifier ma langue gauloisement insurgée dans les lieux publics battus par les imaginaires stériles. J'aime "déclamer" des vers cyrilliques pour faire trembler ces anglicismes qui s'arrogent le trône de nos plus belles expressions. Dans l'allégresse, j'apprécie de laisser les sursauts de mes passions orientales exhaler leurs parfums par delà les limites de ma raison. Car qui cherche à me comprendre, doit rêver et penser comme moi, se défaire de sa propre raison pour épouser la langue de mon esprit. Et cette langue est dissociée de ce réel que vous ne connaissez que trop bien. Elle est nourrie et pétrie par un imaginaire dense comme une sylve immémoriale que nulle ne peut violer.
Il faut parcourir les chemins anxieux et délirants qui se contortionnent dans mon esprit, pour saisir le moi curieux et impétueux qui fulmine au fond de ma chair.
"Crier des vers de Tiouttchev ou de Pouchkine dans la rue, qui est assez fou pour se livrer à ces fadaises ?" me direz-vous. Pour moi, c'est un sursaut, une ardeur exaltée de l'instant qui émanent de ma déraison comme un ectoplasme fougueux sur le visage d'un médium, quand je suis affranchis du labeur quotidien. Quiconque aura l'audace de dessérer les sangles de sa vertu pour délirer avec moi devra parler et écrire avec la langue et l'alaphabet de l'imaginaire et des sentiments, du romantisme et de la déraison. Mais même si vous parvenez vainement à décoder ma langue, d'autres brouillards, plus épais et au blanc plus crayeux, voileront et masqueront d'autant plus cette cité d'arbres et de lianes qui m'habite en moi-même.

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